L’école supérieure d’Arts de Brest a coutume chaque année de présenter au public les travaux de ses étudiants diplômés, lauréats du Diplôme National d’Expression Plastique. Diplôme sanctionnant cinq années d’études, les deux dernières étant spécifiquement consacrées au projet personnel de l’étudiant. Années cruciales où la recherche engagée se développe au sein de l’une des deux options proposées à Brest : Art et Design.
Pour la première fois le Centre d’Art Passerelle accueille cette exposition affichant, ainsi que l’ESAB, la volonté de développer encore une collaboration nécessaire aux deux institutions.
En juin dernier quinze postulants ont été distingués : Mathieu APPRIOU, Loïc BETHEGNIES, Gwenaël GAUTIER, Fabrice KORNER, Tanguy MARION, Mathieu SIFFIER, Elizabeth SAINT-JAMES, Vincent TARAUD [option Art], et Grégory BOUVIER, Perig GOUTTEUX, Soazig JOLY, Véronique LE TERRIEN, Corinne MARECHAL, Cécile PELLEN, Magali SANNIER [option design].
Une unique exposition car l’option choisie ne modifie que subtilement recherches et mises en œuvre. Les compétences requises sont parfois différentes mais les préoccupations plastiques et créatrices sont similaires. Au sein de chacune de ces sections, l’équipe pédagogique a le souci majeur de permettre à chacun de mener à bien le projet qui l’habite. L’intervention des enseignants est avant tout un accompagnement. Ainsi peut s’exprimer la diversité des préoccupations, des problématiques, des démarches, des mises en forme, des références. Il ne s’agit pas de faire école, de reproduire les modèles existants ; mais de mettre l’accent et d’encourager des démarches originales. Originales dans le sens où elles sont l’expression des intentions et des réponses personnelles à des questionnements particuliers. Ce que ne vient pas démentir l’émergence visible de sensibilités parentes à des préoccupations communes au monde d’aujourd’hui.
« Au bénéfice du doute » peut sembler de prime abord un titre douteux, ambigu. Les enseignants douteraient-ils de la pertinence des différents travaux présentés ou des potentialités futures des lauréats ? En aucun cas. Le doute ici est positif. Le doute entretenu par tout créateur digne de ce nom, qui expérimente, avec plus ou moins de réussite parfois, qui remet en question ses acquis. Le doute pour éviter de ronronner béatement dans quelques conventions établies, pour éviter de sombrer trop vite dans la redite de recettes faciles. Mais le doute aussi qui doit saisir le visiteur. Le doute au sens de l’interrogation et non du ricanement suffisant, s’interroger sur le sens du monde qui l’environne. Apprendre à douter de ce que l’on voit, de ce que l’on entend, de ce que l’on croit savoir. Car enfin les œuvres des plasticiens d’aujourd’hui, artistes confirmés et débutants, plus peut être à ce jour qu’hier, interrogent bien souvent de manière inquiète le monde contemporain, dans ses errances comme dans ses certitudes. Ainsi voit-on ici pointer du doigt le recyclage des déchets, la profusion confuse de l’information, l’angoisse millénariste, le statut de l’image et de l’information dans les médias, la publicité, l’héritage de l’histoire de l’art, la convivialité, le sport, l’écriture, la virtualité, la scénographie, l’altérité… Tous proposent un regard sur des problèmes qui concernent tout un chacun, y apportant ou non des réponses concrètes. Un regard déformant, grinçant, qui souvent par le biais de l’ironie vient déjouer les pièges que nous tend le reflet sécurisant de la télévision et les médias en général, où art et vie ont tendance de plus en plus à se confondre. Où l’art n’est plus la consécration du Beau idéal, mais une manière d’être au monde avec lucidité et créativité.